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Bibliothérapie pour télétravailleur confiné #3 - Il n'y a rien d'autre


Aujourd'hui, nous entrons avec indolence dans notre troisième semaine de confinement. Selon les domaines d'activités, notre âge ou notre lieu de vie, nos journées ne se ressemblent pas. Pour autant, dans l'interstices des séances, j'entrevois une lassitude partagée, un voile de brume collante qui ressert peu à peu notre pouvoir d'agir. Les perspectives d'avenir paraissent figées comme autant de points de suspensions infiniment prolongés. Pour briser cette chaine d'impuissance indolente, j'ai eut envie de relire un de mes "mentors involontaires" : Tal.

Tal et moi, c'est une longue histoire. Tal Ben Shahar, professeur de psychologie à l'université d'Harvard, qui sans le savoir m'a guidé à de nombreuses reprises dans mon cheminement personnel tout comme il l'a fait auprès des milliers d'étudiants qui ont suivi ses cours et des lecteurs du monde entier. J'ai donc repris ce livre familier et j'y ai trouvé ce texte limpide, parfait compagnon pour notre voyage statique de la semaine.

"Il n'y a rien d'autre

Parmi les obstacles qui s'interposent entre le bonheur et nous se trouve souvent une espérance erronée : un livre, un professeur, une princesse, un prix chevalier, une prouesse, un trophé, une révélation qui nous vaudront un jour la félicité éternelle. Tout cela peut contribuer à notre bien-être : mais sans, au mieux, constituer plus qu'une petite partie de la mosaïque du bonheur. La conception du bonheur selon les contes de fées (la croyance que quelqu'un ou quelque chose nous rendra heureux jusqu'à la fin de nos jours) conduit inévitablement à la désillusion. Une vie heureuse - ou plus heureuse- ne résulte pas de quelque événement extraordinaire, de nature à bouleverser l'existence entière; elle se construit peu à peu, expérience après expérience, période après période.

Pour réaliser - c'est à dire "rendre réel" - la potentiel de capital suprême que contient chaque vie, nous devons d'abord accepter que tout est là : il n'y a rien de plus à vivre que les détails quotidiens, ordinaires, de la mosaïque. On mène une existence heureuse quand on tire du sens et du plaisir dans le temps passé avec ses proches, dans l'acquisition de connaissances nouvelles, ou dans la mise en oeuvre de tel projet professionnel qui nous intéresse. Plus nos journées seront pleines de ce vécu-là, plus nous serons heureux.

Il n'y a rien d'autre."

" Tal Ben Shahar - "L'apprentissage du bonheur" p247. "

Aujourd'hui, confinés du week-end, nous ne pouvons plus nous tourner vers nos remèdes habituels. Notre possibilité d'être en lien avec l'autre s'amenuise. De plus en plus, nous restons en tête à tête avec nous même. Nos stratégies d'évasion sont empêchées et n'ont plus cours dans ce quotidien encore un peu plus ordinaire qu'à l'ordinaire.

Nous devons alors accepter que pour l'instant : "tout est là et qu'il n'a rien de plus à vivre aujourd'hui que les détails ordinaires de la mosaïque."

Oui, décidément, il n'y a rien d'autre, pas d'autre choix possible que de partir sur le chemin qui mène à cette construction volontaire et résolue.

Comme le dit Emile Durkheim*," Vivre, c'est avant tout agir, agir sans compter, pour le plaisir d'agir. "

Il n'y a pas de raccourci ou de formule magique. Je garde donc auprès de moi cette espérance lucide et libérée. Je continue à bâtir cette mosaïque de joies éphémères et de micro-bonheurs de proximité juste pour le plaisir d'essayer.

*Archive de la parole, conservée à la Bibliothèque nationale de France. Émile Durkheim



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